L'Abandon
Sens et valeur
Suivant que tu le subisses ou que tu le fasses tien, que tu sois passif ou actif, cela change la situation qu'induit ce mot. L'abandon subit met en relief le pouvoir que l'autre a sur toi et lorsqu'il te quitte, tu te sens délaissé, négligé, vidé, seul. Un être vous manque et tout est dépeuplé. Si l'abandon se présente, c'est qu'il est temps pour toi de ne plus vivre à coté de toi, de ne plus vivre pour l'autre. Aussi douloureux soit-il, cet abandon est là pour t'ouvrir les yeux sur ta relation à l'autre, pour t'engager à plus de justesse, que tu ne te perdes pas en l'autre, que tu acceptes le mécanisme de fusion-défusion comme une respiration. Le partage intime n'est plus synonyme d'une béatitude absolument à tenir.
Tu te sens perdu lorsque le bien-aimé ou la bien-aimée n'est plus à tes cotés. C'est un vide qui t'aspire en une dépression salutaire. Dans ce néant, tu vas te trouver. Cela nécessite d'accepter de s'abandonner au temps de l'abandon, de s'en remettre au pouvoir de la vie et non pas aux pouvoirs de l'autre. (Abandon vient du vieux français à bandon, au pouvoir de...).
La peur de l'abandon a des racines profondes, archaïques, voire ontologique ; nous nous sommes sentis dès l'origine abandonnés de Dieu.
Lorsque l'abandon se présente, nos émotions sont bouleversées, chahutées, dévastatrices. Le choc est dur, rude mais tu peux passer l'épreuve en ne luttant pas. Cela est difficile, au début, tu nies, attaques et diabolises, tu tempêtes, accuses l'autre, la vie, Dieu. Et puis, petit à petit, tu te rapproches de toi, ton doigt accusateur opères 180°, te pointe et là tu comprends. Quelque chose de non-juste dans ta relation (qui est un aspect de la divinité) a besoin d'être vu, repéré, éclairé pour n'être plus répété. Tout cela pour que tu vives libre. Libre avec, libre ensemble ou libre seul, suivant ton choix mais libre en ne t'abandonnant plus jamais. Il n'y a plus alors de : j'abandonne, je t'abandonne, je suis abandonné. Il n'y a plus que : je m'abandonne...
Parole Intime
Je rassemble en toi ces deux forces, entre s'abandonner et la blessure de s'être senti abandonné. Plus tu t'es senti abandonné, laissé de côté, plus grand sera ton abandon, à te jeter dans le feu, sans retenu, sans crier gare.
Je suis en toi ce qui transcende la souffrance d'être séparé du grand amour, comme s'il pouvait passer te brûler un instant et continuer son chemin d'incendie sans toi. Te plantant là, plus isolé encore sur une terre encore plus vide, noire et ravagée.
A l'instant ou tu ressens la douleur si connue d'être abandonné, j'éveille en toi le geste irréversible de l'abandon et tu t'abandonnes. Tu te mets en la flamme et décide de faire ton chemin avec elle, en elle, pour toujours.
Cette flamme ne t'a pas invité. Tu n'as pas attendu qu'elle t'espère ou te lâche, tu y a pris ta place, la toute tienne, de manière sensible et radicale. Toi dans le feu de la ferveur folle d'aimer. Aimer sans retour, aimer sans rien retenir. C'est toi, mon fol amour, cette puissance fervente de l'abandon à Dieu. C'est toi quand tu le décides, à chaque instant. Qui veux-tu être ? Celui laissé là en attente ? Tu attends alors que le divin vienne te chercher, au moins, s'il vient, tu auras une preuve de son soi-disant amour. S'il t'aime, il ne peut te laisser là ou tu te caches ! Tu peux aussi être celui qui n'attend rien, qui ose aimer en toute démesure, de tout son être. Celui qui s'abandonne au feu qui brûle , celui qui se sait aimé de Dieu et ne l'abandonnera jamais.
Je suis en toi la liberté de choisir que tu n'as plus. Tu pleures depuis trop longtemps de t'être senti abandonné. Abandonne-toi, donne-toi tout entier. Que cette blessure si vive devienne la bouche de ton désir si vif ! Aime, risque, aime de tout ton cœur, de toutes tes tripes, de tout ce qui vibre, tremble, mouille et s'enflamme. Et que l'amour te transporte en son feu, de partout.
Au ras des pâquerettes
A chaque fois que tu t'es senti abandonné, il y avait une prière de la vie pour toi: abandonne toi...La possibilité d'un éveil. Plonge en toi, ferme les yeux, laisse venir la reconnaissance de cela.
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